C’est que les discours s’attachant à déconstruire le conspirationnisme sont victimes d’un double-bind dans la mesure où ceux qui les tiennent sont rapidement ramenés à la qualité de soldat d’un système honni, et leur argumentation évacuée par pertes et profits. C’est notamment cet échec que le présent numéro vise à mieux comprendre, notamment par la mise en évidence de clés de succès du phénomène complotiste qui ont été insuffisamment analysées jusqu’ici – son rapport au retour de la propagande russe et ses dimensions psychologiques profondes, entre autres.

Plus largement, le conspirationnisme fonctionne également comme symptôme d’une maladie démocratique qu’il contribue à aggraver. S’il faut bien entendu s’attaquer au symptôme lui-même, cette lutte demeurera probablement encore largement inopérante  si elle n’est pas accompagnée d’une revivification plus large de notre fonctionnement politique. Ce n’est que lorsque les citoyens retrouveront – ou mieux, créeront –  une offre politique à la hauteur des défis de notre époque, que le complotisme cessera de constituer un refuge à la fois morbide et rassurant.

En effet, ni les théories du complot ne révèlent en réalité rien de ce qu’elles entendent révéler, elles agissent néanmoins comme révélateur de notre désenchantement démocratique. Le drame étant que ce révélateur est également un puissant facteur d’impuissance, et participe à ce titre de ce désenchantement même.

Le dossier de la revue

• Complotisme : tremplin vers le radicalisme violent ou chemin parallèle ?
• De peur de se brûler, il sauta dans le feu
• Au-dela du phénomène Soral, la récupération politique Pour une vraie démocratie - (vraiment) protestataire

Le portrait

 Hafsa, un soleil à Molenbeek